par Jeffrey PINDELSKI
Firehouse.com
Nous avons tous que la lutte contre l'incendie est en soi une
profession dangereuse. A l'approche de la fin d'année,
les sapeurs-pompiers doivent maintenant faire face à des
demandes supplémentaires, dues aux abondantes chutes de
neige et aux températures extrêmes. Les risques et
les complications dans les interventions en période d'hiver
peuvent être surmontés par les sapeurs-pompiers qui
travaillent pour comprendre ces risques et ces conditions et se
préparent correctement à l'avance.
D'après les services météo, environ 70%
des décès relatifs à l'hiver, se produisent
sur la chaussée. Un grand nombre de ces décès
peuvent être attribué à la présence
de verglas , les conducteurs étant peu familiers avec la
conduites de véhicules dans ce type de conditions.
D'année en année, il est constaté que
le nombre de morts chez les sapeurs-pompiers est en lien étroit
avec leur déplacement dans le cadre des réponses
d'urgence (NdT : ce document est Américain,
mais la réalité Française est tout à
fait identique. Majoritairement les "morts en service"
sont en fait des "morts sur la route").
Véhicule du FDNY accidenté à cause
de la chaussée rendue glissante par le neige.
|
Les sapeurs-pompiers devraient être formés de
façon intense à la conduite de leur véhicule,
et être au courant des particularité de ceux-ci,
surtout dans ce contexte particulier. L'augmentation des distances
d'arrêt, la diminution de visibilité et les actions
imprévisibles des automobilistes civils auront un effet
sur la conduite à tenir. Les itinéraires pour se
rendre sur les lieux d'intervention, devront prendre en compte
le temps de déplacement et l'accessibilité en fonction
de la neige et du verglas. La prise en compte de ces précautions,
appropriées et nécessaires par temps extrême
va amener un allongement des temps d'intervention (Quelle influence
cela aura-t-il sur les actions à mener par les premiers
intervenants ?). Mais le point important dont il faut se rappeler
c'est que l'engagement des secours n'a de valeur que s'ils arrivent
indemnes sur les lieux.
|
Une fois arrivé sur les lieux, le Chef d'Agrès
devra prendre des décisions critiques pour gérer
l'engagement. Parmi ces questions : Les positions tactiques envisagées
sont-elles applicables ou sont-elles gênées par
la neige ? Le personnel peut-il accéder à tous
les côtés du bâtiment et y a-t-il des risques
ou obstacles actuels qui ne sont pas visibles, soit à
cause de la neige ou de la glace, comme des escaliers, des descentes
de caves, des piscines extérieures etc Les bouches d'incendie
sont-elles visibles et accessibles ? Une planification correcte,
réalisée avant la période de mauvais temps,
peut éliminer certains de ces risques.
L'approvisionnement en eau
Une fois les engins alimentés, les responsables des pompes
devront toujours laisser des écoulements d'eau, afin d'éviter
que les tuyaux ne gèlent et que les pompes ne soient prises
par la glace. L'eau statique gèlera comme nous savons
déjà, à 0°C mais si elle a assez de
mouvement, l'eau ne gèlera pas spontanément avant
que la température ne descende jusqu'à 40°C.
|
Repositionnement d'un tuyau par une température
très basse.
|
Quelques notions de chimie de base peuvent fournir une
meilleure compréhension du comportement de l'eau dans
le froid extrême. L'eau existe dans les trois états
: solide (glace), liquide, et gazeux (vapeur). La différence
principale qui différencie ces trois états, c'est
le mouvement des molécules qui composent l'eau. Quand
on ajoute de la chaleur (par exemple sous la forme du frottement
provoqué par le mouvement), les molécules bougeront
plus rapidement et librement. Lorsque l'eau gèle, le mouvement
des molécules ralentit et commence à former un
cristal : la glace. Quand l'eau gèle, sa densité
(ou masse par volume unitaire) augmente également jusqu'à
ce qu'il atteigne en totalité un état cristallisé.
C'est ce phénomène qui maintient seulement en surface
les couches supérieures des lacs gelés ou les cubes
de glace flottant dans une boisson. Lorsque l'eau est resserrée
comme dans un tuyau, cette expansion de la masse exerce une forte
pression, qui peut engendrer de gros dégâts. Dans
n'importe quel cas de fonctionnement par temps froid, les tuyaux
devront être vidangés dès que l'écoulement
d'eau s'arrêtera ou que les tuyaux ne serviront plus.
Par temps froid, l'écoulement d'eau sur le sol est
propice aux chutes et glissages, à cause de la glace qui
va se former. Le chlorure de sodium ou le sel " de route
", de part leur capacité à empêcher
le givrage des sols, font généralement parti de
l'équipement des engins incendies. Généralement,
le sel est souvent appliqué sur la glace une fois qu'elle
est déjà formée. Malheureusement, le sel
doit d'abord être dissous pour qu'il puisse agir efficacement.
Le sel casse les liaisons chimiques et empêche l'alignement
des molécules d'eau et donc de former les cristaux dont
nous avons déjà parlé. Si le sel est appliqué
avant que l'eau ne gèle, il sera aisément dissoute
et abaissera efficacement le point de congélation de l'eau.
|
L'eau qui s'écoule d'un hydrant forme rapidement
une surface glissante.
|
Problème sur le lieu d'intervention
En plus des risques évidents de chute, la glace présentera
d'autres risques et problèmes sur l'intervention.
Car l'eau, appliquée à une structure brûlante,
gèlera et ne coulera pas. Au fur et à mesure de
l'application d'eau sur la structure, le poids de la glace et
l'effort additionnel que cela causera sur les pièces de
charpente augmenteront le risque d'effondrement. Les pièces
métalliques et les cordes des échelles à
coulisse peuvent glacer, les rendant inopérables ou difficiles
à utiliser. Les échelles aériennes peuvent
être prises dans la glace, avec une augmentation de poids
pouvant amener des disfonctionnements, ou même un vrillage
de l'échelle.
Les appareils respiratoires (ARI), utilisés en intervention
incendie, sont certifiés par le NIOSH (Ndt : organisme
Américain) pour pouvoir être utilisés
avec des températures aussi basses que 31°C, mais
ils devront toujours être employés avec prudence
durant la période froide. Aller du froid extrême
(en extérieur), vers une source de chaleur importante peut
poser des problèmes avec les appareils respiratoires. Il
est impératif que les ARI soient correctement vérifiés
et entretenus. La qualité de l'air devrait être vérifié,
pour s'assurer que le niveau d'humidité dans l'air respiré
reste à un minimum pour empêcher le glaçage
des composants internes des ARI. Une zone de protection nasale
devrait être utilisé à l'intérieur
des masques pour empêcher l'opacité de la partie
transparente, ce qui altère la vision des sapeurs-pompiers.
Tous les sapeurs-pompiers devront être formés et
être complètement au courant des procédures
de secours, dans le cas d'un disfonctionnement de leur ARI (NdT
: techniques RIT, non-appliquées en France).
Hypothermie et gelures
Des renforts permettant de traiter les cas d'hypothermies et de
gelure devront être rapidement demandés sur les lieux
de l'intervention. Dans des conditions de froid extrêmes,
les sapeurs-pompiers ne seront capable de lutter contre ces éléments
que durant une période de temps très courte. Tous
les officiers et les sapeurs-pompiers devraient être capable
de se rendre compte des signes et des symptômes de gelure
et d'hypothermie. Ils devraient également se familiariser
avec des manières pouvant les empêcher.
La morsure de gel est provoquée par l'exposition de
parties du corps, au froid extrême. S'il fait très
froid, le temps d'exposition nécessaire peut-être
très court. Le fluide contenu dans le corps exposé,
peut geler et provoquer des dommages et des nécroses aux
vaisseaux sanguins, ou même la mort des tissus situés
dans la zone affectée.
Plusieurs facteurs contribuent à la sévérité
de la gelure:
- La température à laquelle la partie exposée
est exposée
- La durée d'exposition de cette partie du corps
- L'état de l'habillement couvrant le secteur exposé
(est-il humide ou sec?)
Le plus souvent ce sont les mains, les pieds, les oreilles
et le visage d'un sapeur-pompier qui sont les plus touchés
par les gelures. La gelure se remarquera suite aux changements
d'aspect de la peau (décoloration par exemple) et sera
accompagnée de l'engourdissement et de la rigidité,
au niveau de la zone concernée. La meilleure manière
d'empêcher les gelures est de protéger la peau pour
empêcher l'exposition directe à l'air froid. Les
sapeurs-pompiers doivent s'habiller avec des vêtements suffisamment
lâches sous leurs tenues de protection. Les matériaux
de ces vêtements doivent permettre l'évaporation
de la transpiration et ne doivent pas compromettre la bonne "
respiration " du corps, sous prétexte de le protéger
du froid. Deux paires de chaussettes et de chaussures correctement
adaptées sont également recommandées.
Un sapeur-pompier couvert de glace, se dirige vers un bus
chauffé.
|
L'hypothermie c'est la chute de la température
centrale du corps en dessous de la température normale.
Les sapeurs-pompiers souffrant de l'hypothermie seront pris de
tremblement, seront "confus", très fatigués
et somnolents. La meilleure manière d'empêcher l'hypothermie
s'est de s'habiller avec quelques couches de vêtements
sous la tenue d'intervention, et de continuer à se déplacer
tout en travaillant sur les lieux de l'intervention, pour maintenir
un bon niveau de circulation. Un accès régulier
à un secteur de repos, chauffé, avec des boissons
chaudes à disposition est également salutaire.
Les sapeurs-pompiers doivent maintenir leurs têtes couvertes
(casquette, bonnet, cagoule) lorsqu'ils travaillent par temps
froid. Pas moins 50 % de la chaleur du corps peut être
perdu par la tête et le port d'un bonnet ou d'une cagoule
aidera à réduire au minimum cette perte. |
Les sapeurs-pompiers
doivent également remplacer immédiatement les vêtements
humides, car les vêtements humides refroidiront la température
centrale du corps beaucoup plus vite que s'il était seulement
aéré. Durant les mois d'hiver, avoir dans les véhicules
un sac avec des vêtements secs, des gants, des chaussettes
et des bonnets est une bonne idée !
Le temps froid peut certainement avoir un impact négatif
sur les sapeurs-pompiers et sur leur équipement. Avec une
prévision, une bonne planification, de la formation et
la conscience des dangers, les risques relatifs aux conditions
de froid peuvent être réduits.
L'auteur
Jeffrey Pindelski travaille depuis plus de 16 ans en service
incendie. Il est actuellement chef de bataillon au Downers Grove
Fire Department en Illinois. Il a précédemment
servi pendant 12 années en tant que sapeur-pompier et
lieutenant dans la Truck and Heavy Rescue Company.
Jeff est instructeur du personnel à l'université
de Du Page et donne également des cours au Downers Grove
Fire Academy. Il est un instructeur certifié III et officier
du feu niveau II par le congrès international d'accréditation
de service du feu tout en étant également certifié
en tant qu'officier de sûreté incendie, par l'office
national sur des qualifications de professionnel de service incendie.
Il a travaillé à la conception de plusieurs
programmes de formation consacrés à la sûreté
et à la survie de sapeur-pompier et est le co-auteur du
texte relatif aux RICO. (Rapid Intervention Company).
Photos Peter Matthews
Article traduit par Pierre-Louis Lamballais, avec l'aimable
autorisation de Jeffrey Pindelski et du magazine Firehouse.
|