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Tactique et Pratique

Tactique (V)
- Paru le 09/01/2010
- Déjà lu 17781 fois.

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Cours formateurs flashover - Draguignan (Canjuers-France) 2009
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Pédagogie et formation bulletArticle: Attention aux fumées !


Lors d'un incendie, la fumée est toujours présente et les sapeurs-pompiers savent bien que la quantité de fumée, son opacité, sa couleur, sont autant de paramètres qui changent tout au long de l'intervention.
Dans cet article, nous allons parler des fumées, en général, puis plus particulièrement des fumées blanches, qui sont la cause de nombreux accidents.

Les fumées
Les fumées présentent plusieurs dangers. Généralement, nous en citons 5, dont nous nous rappelons par un moyen mnémotechnique simple, en disant que les fumées sont COMIX . Chaque lettre de ce petit mot nous permettra de nous rappeler des dangers de la fumée.

C comme chaude. La fumée vient du feu, donc elle est chaude. C'est une évidence. Mais un feu émet sa chaleur autour de lui (par rayonnement) et au-dessus de lui (par convection). Or, on estime que 60 à 70% de la puissance thermique d'un feu part par le haut (par convection). Les fumées se trouvant de ce " panache ", elles sont très chaudes !

O comme opaque. Les fumées sont constituées de particules en suspension. Les fumées sont donc opaques et il est assez difficile et même parfois impossible, de voir au travers. Mais elles sont aussi opaques (bien que le mot ne convienne pas vraiment) à l'ouïe. Dans les fumées les sons sont assourdis, on entend "comme dans du coton". Nous constatons également que la détérioration de la vision, dans les fumées, s'accompagne d'une déformation des couleurs: le jaune devenant orange et le orange devenant rouge. Ce dernier point est gênant car un feu jaune, c'est un feu bien oxygéné tandis qu'un feu rouge manque de comburant. Lorsque nous regardons le feu au travers de la fumée, nous devons prendre en compte la déformation de couleur, afin de déterminer avec le plus de justesse possible, la couleur exacte du feu donc sa ventilation.

M comme mobile. La fumée est un élément gazeux. Comme tout gaz, la fumée se conforme à la Loi de Charles que l'on peut simplifier ainsi: "les gaz chauds se dilatent, les gaz froids se contractent". Puisque la fumée est chaude, elle se dilate, donc elle prend beaucoup de place et en plus, elle est très légère. Elle va donc monter dans les combles, sous les toits, se trouver bloquée au plafond, va s'insinuer dans la moindre fissure de mur... Cette mobilité est à prendre en compte lors des déplacements dans les locaux: la fumée va apparaître comme une sorte de couche épaisse, noire ou brun foncé, lourde. Sa couleur, ses mouvements dans le local (ondulation au plafond), vont donner l'impression qu'elle est presque solide: elle ressemble à une sorte de purée, et l'on s'attend à ce que la main puisse y faire un trou. Or, il n'en est rien. Derrière cette apparente lourdeur se cache une grande légèreté. Un geste brusque, un coup de lance mal placé, un déplacement un peu rapide et voilà la fumée qui s'agite, occupe tout l'espace et aveugle complètement les intervenants.

I comme inflammable. Lors d'un feu, le combustible dégage le carbone qu'il contient. Lorsque le feu est bien ventilé (en extérieur par exemple), il dégage un mélange de carbone et d'oxygène avec une bonne quantité d'oxygène. Sans rentrer dans des considérations proches de la chimie, nous pouvons dire qu'avec du carbone et pas mal d'oxygène, nous avons un feu qui génère du CO2. Mais dans un local, le comburant est presque toujours en quantité insuffisante. La combustion génère donc un mélange de carbone et d'un peu d'oxygène donc du CO. Or le CO est un gaz hautement inflammable. Contrairement à ce que nous avons cru durant de nombreuses années, la fumée n'est donc pas un simple résidu de combustion: c'est un nouveau combustible, gazeux.

X comme toXique. Paradoxalement c'est le danger qui nous concerne le moins puisque tout sapeur-pompier en intervention met un appareil respiratoire isolant. Il faut quand même savoir que, suivant ce qui brûle, les fumées peuvent contenir des acides (chlorhydrique, cyanhydrique etc)

Les étapes de l'incendie
Concernant les fumées, nous pouvons distinguer trois étapes:

  • la production de fumées lors du démarrage
  • la production de fumées durant le déroulement "normal" du feu
  • la production de fumées lorsque les flammes ont été éteintes.

L'expérience de l'allumette
Pour commencer nous allons faire une expérience simple, en craquant une allumette.
Nous déplaçons rapidement l'allumette sur le côté de la boîte, afin de provoquer un échauffement puis une inflammation. Lors de l'échauffement de l'extrémité de l'allumette, nous voyons apparaître de la fumée, plutôt claire (gris - blanc). La flamme apparaît immédiatement et cette fumée disparaît. Soufflons maintenant notre allumette. La flamme disparaît et les fumées blanches réapparaissent.
Nous avons là, en tout petit, le déroulement complet d'un incendie !

Allumage: présence de fumée blanche, tout autour de l'allumette. La flamme est bien en place: la fumée a disparu. Extinction: l'allumette recommence à fumer abondamment.

Que s'est-il passé ?
Au départ, il y a échauffement. Dans le cas de l'allumette, cet échauffement est provoqué par le frottement rapide sur le côté de la boîte. Dans un incendie, il peut être provoqué par un radiateur électrique en contact avec un fauteuil par exemple. Au départ, l'échauffement va provoquer l'évaporation de l'eau contenue dans le combustible. Pendant quelques instants il va donc y avoir production de vapeur d'eau puis l'échauffement va se poursuivre. Cet échauffement se nomme la pyrolyse. C'est la destruction du combustible par la chaleur, mais sans flamme. Lors de cette phase, le combustible dégage de la fumée de pyrolyse, qui est de couleur blanche.
Cette fumée est hautement combustible, mais à ce stade, la chaleur n'est pas suffisante pour qu'elle prenne feu.
Dans le cas de notre allumette, cette production de fumée blanche se fait sur un temps extrêmement court, car la chaleur augmente rapidement et ces fumées, hautement inflammables, prennent feu. Comme elles sont en volume assez important, au moment de leur inflammation, il y a une grande flamme.
C'est un peu comme sur une gazinière: si vous présentez une flamme au brûleur, avant d'ouvrir celui-ci, dès que le gaz sortira il prendra feu. Maintenant, si vous ouvrez le robinet quelques secondes avant de présenter une flamme, il y aura accumulation de gaz. A l'approche de la flamme il y aura un "vlouf !" avec une grande flamme. Dès que ce volume de gaz aura brûlé, la flamme diminuera pour avoir une taille en rapport avec le débit de gaz.

Pour notre allumette (et dans un incendie) c'est la même chose: une fois que le volume de fumée blanche est consommé, l'allumette continue à pyrolyser mais cette fois les gaz sont brûlés au fur et à mesure de leur production. Nous avons donc une flamme d'une taille inférieure, qui est alimentée par la pyrolyse du bois de l'allumette.
Le feu va alors continuer à avancer, avec un cycle immuable: il chauffe le combustible, celui-ci produit des gaz qui s'enflamment, ce qui produit donc de l'énergie qui chauffe une autre partie du combustible et ainsi de suite.

La seconde phase, c'est celle des flammes. Avec notre allumette, il n'y a pas de dégagement de fumées. Par contre dans un local, cette seconde phase fume beaucoup. Généralement, la raison qui est donnée c'est que le local est sous oxygéné: pour son fonctionnement, un feu a besoin d'une grande quantité d'oxygène. Or, il n'y a que 21% d'oxygène dans l'air et en dessous d'une concentration de 14% (environ), il ne peut plus y avoir de flammes. Nous n'avons donc que 21-14 = 7% du volume d'air utilisable pour la combustion, ce qui est peu. Dans un local, même avec une porte grande ouverte, le renouvellement d'air ne réussira pas à fournir assez d'oxygène au foyer.

Mais s'il est exact qu'un feu de local manquera toujours d'air, le fait qu'il y ait beaucoup de fumée n'est pas forcément lié à ce paramètre. Prenez votre poêle à bois: lorsque vous ouvrez l'arrivée d'air du dessous, les flammes grandissent et le poêle se met à ronfler. Si vous fermez l'arrivée d'air, il ne se met pas à fumer: les flammes baissent simplement d'intensité.

La fausse expérience du Bec Bunsen
La "preuve" du lien entre le manque de comburant et la fumée, est souvent faite par l'usage d'un Bec Bunsen. On ferme l'arrivée d'air et la flamme se met à fumer. En fait, l'expérience est faussée. A la base elle ne devrait servir qu'à montrer la différence entre les flammes de prémélange et les flammes de diffusion, c'est-à-dire la combustion d'un mélange combustible-gaz par rapport à la combustion d'un combustible qui n'est pas prémélangé au comburant.
Pour revenir à notre "flamme qui fume", il existe un principe de chimie, le Principe de Lechatelier, qui dit qu'une réaction chimique déséquilibrée, va tout de suite chercher à s'équilibrer. Or, nous parlons bien ici de flamme, donc de combustion, donc d'une réaction chimique. Et nous avons toujours représenté le feu par le fameux "triangle" donc par une figure "équilibrée". Dès que le taux d'oxygène baisse, le feu baisse tout de suite d'intensité, de manière à conserver un équilibre entre sa production d'énergie, le combustible qui réagit et le comburant disponible. Dans notre poêle à bois, c'est ce qui se produit: lorsque nous fermons l'arrivée d'air, le feu baisse immédiatement d'intensité afin de consommer une quantité de combustible en adéquation avec la quantité de comburant.

L'anti-ventilation
C'est ce principe d'équilibre qui explique la réussite de la tactique d'attaque avec l'anti-ventilation. Le binôme rentre dans le local en feu, et tandis que le Chef attaque le feu, l'équipier reste à la porte et maintient celle-ci fermée sur le tuyau. Il suffit en effet de fermer la porte d'une pièce en feu pour voir immédiatement le foyer baisser en intensité, ce qui laisse d'ailleurs supposer que les intervenants, en ouvrant en grand les portes pour aller attaquer le feu, sont souvent responsables de la montée en puissance de celui-ci, montée en puissance qui va parfois jusqu'au flashover.

L'expérience de l'assiette
Pour comprendre pourquoi "ça fume", prenons une bougie allumée et une assiette. Plaçons l'assiette au-dessus de la bougie, attendons, regardons: l'assiette n'est pas noircie. Baissons l'assiette et recommençons. Nous allons nous rendre compte que l'assiette se noircit, très rapidement, dès qu'elle touche la flamme. Pourquoi ? La flamme c'est en quelque sorte une zone de destruction du combustible. Le combustible chauffé émet des gaz et ceux-ci réagissent chimiquement dans la flamme. Si la flamme fait une certaine taille, c'est simplement parce qu'il faut qu'elle ait cette taille pour pouvoir réaliser la totalité de la réaction chimique. Si on ajoute du combustible, la réaction chimique doit devenir plus importante, donc la flamme s'agrandit. Si on retire du combustible, la flamme diminue. Lorsque l'on descend l'assiette très bas, celle-ci "coupe" la flamme. Il manque donc un "morceaux "de flamme.

La flamme de la bougie est à quelques millimètres de l'assiette. Et il n'y a pas de fumée. La flamme de la bougie touche très légèrement l'assiette. Immédiatement, un important dépôt noir se forme sur l'assiette.

Or c'est ce qui se passe dans un local. Si nous prenions un fauteuil, en plein air, et que nous y mettions le feu, nous verrions que la flamme résultante dépasse largement les 2,50 m de hauteur de plafond habituelle d'un local. En admettant que la flamme du fauteuil fasse 4 m de haut, dans un local, il manquerait donc 4 - 2,50 = 1,50 m de flamme. Or, si le fauteuil produit une flamme de 4 m de haut c'est bien parce qu'il faut une telle flamme pour que la réaction chimique se fasse correctement. Avec ce même fauteuil, mais une flamme de seulement 2,50 m, la réaction chimique est incomplète et tout ce qui ne brûle pas part dans les fumées, qui sont donc très abondantes et surtout, qui contiennent des éléments qui, normalement, auraient dû brûler !

Et la situation ne va pas s'améliorer: les fumées, abondantes, vont se stratifier au plafond. Elles vont donc constituer rapidement une zone dans laquelle la combustion ne pourra qu'être médiocre par manque d' oxygène. Il va donc y avoir trois zones:

  • Une zone basse dans laquelle les flammes seront bien oxygénées et dans laquelle la réaction chimique sera assez bonne.
  • Une zone supérieure, dans laquelle les flammes seront sous oxygénées car en plein milieu des fumées et où la réaction chimique sera mauvaise
  • Une zone " absente " à cause du plafond.

Attention, ceci ne constitue pas la seule explication: la forme du local est également à prendre en compte, le type de combustible, la chaleur etc Mais en tout cas, le simple fait qu'il n'y a pas assez de comburant n'est pas l'unique raison.

Mais poursuivons pour arriver maintenant à la troisième étape: l'extinction. Les sapeurs-pompiers sont intervenus, ils ont arrosé et il n'y a plus de flammes. Dans le cas de l'allumette, nous avons soufflé dessus.
Dans les deux cas, nous voyons réapparaître des fumées blanches. Dans le cas de l'extinction d'un incendie, il est fréquent d'entendre les sapeurs-pompiers dire que ces fumées sont tout à fait normales, puisque d'après eux, ce sont les vapeurs émises par l'eau qui est entrée en contact avec le combustible. Pourquoi pas. Mais dans ce cas, pourquoi l'allumette fume-t-elle lorsque nous l'éteignons en soufflant dessus ?
En fait, le combustible est encore chaud. A ce stade, il se comporte donc comme il se comportait au tout début: il est chaud, il est donc en train de pyrolyser et émet donc à nouveau des gaz combustibles.

L'expérience de la bougie
Continuons nos petites expériences. Nous avons en effet la chance d'être face à un élément, le feu, qui réagit de la même manière qu'il soit petit ou grand. En apprenant à l'observer en miniature, nous pouvons comprendre comment il "fonctionne" et améliorer ainsi nos méthodes pour le contrer.
Prenons une bougie, et allumons là. Attendons quelques instants, pour qu'elle soit assez chaude. Allumons une allumette, soufflons la bougie et rapidement, approchons l'allumette. Nous allons voir que la bougie reprend feu, alors que nous n'avons pas touché la mèche avec l'allumette, mais que nous avons simplement approché celle-ci.
Lorsque nous avons éteint la bougie, celle-ci a continué, pendant un cours instant, à produire des gaz combustibles. Ce sont ces gaz qui ont pris feu à l'approche de l'allumette.

Dans le cadre d'un incendie, impliquant par exemple un canapé, une armoire et une télévision, nous sommes en présence d'une masse de combustible assez importante. Là ou la bougie, avec sa mèche minuscule, n'a réussi à produire des gaz de pyrolyse que pendant un temps très court, dans notre local, la production pourra durer plusieurs minutes, voir plusieurs heures. Et comme il n'y a plus de flammes, ces gaz ne sont pas détruits. Et comme ils sont chaud, ils se déplacent et montent dans les combles, dans les zones sous-plafond etc.

Bien mélanger pour bien enflammer
Pour que ces gaz prennent feu, il faut évidemment une source d'inflammation, mais il faut aussi du comburant. Dans un feu "classique" c'est-à-dire un feu avec des flammes, il y a du combustible, de l'énergie, et du comburant. La chaleur, qui résulte du feu, génère une différence de température importante entre le bas et le haut du local. Il s'en suit une différence de pression et de forts courants d'air. Dans un incendie, il y a de nombreuses turbulences. Or, ces turbulences mélangent les gaz combustibles avec le comburant et favorisent ainsi leur inflammation. En même temps, la présence de flammes, c'est la preuve d'une réaction chimique, qui va consommer le comburant. Le local va donc manquer de comburant, ce qui va en favoriser l'apport par la porte ou la fenêtre ce qui va à nouveau favoriser les turbulences.

Dans le cas des fumées blanches de début ou de fin d'incendie, rien de tel: les fumées sont émises alors qu'il n'y a pas de flamme. Il n'y a donc pas de forte chaleur, donc pas de différence de pression donc pas de turbulence. Les fumées blanches peuvent rester très "compactes", véritables blocs de gaz avec lesquels le comburant n'est pas mélangé. De même ces fumées peuvent rester au même endroit, par exemple au-dessus du fauteuil qui est en train de pyrolyser. Si elles se déplacent, ce sera sans doute assez lentement. Cela leur laissera le temps de s'infiltrer un peu partout avant qu'on ne les remarque. Enfin, durant leur trajet, elles perdront leurs particules lourdes et pourront devenir très légères et difficiles à observer. Enfin, étant donné qu'il n'y a pas de flamme, le comburant reste présent dans le local.

Celui-ci devient donc un volume instable: il y a du gaz combustible, du comburant et un peu d'énergie. L'ensemble pourrait prendre feu, mais il manque peut-être un petit peu d'énergie, un peu d'air etc En ouvrant une fenêtre, en déplaçant un objet, les intervenants peuvent améliorer le mélange et permettre à celui-ci de réagir. Et comme le combustible présent est un gaz, la propagation sera fulgurante !

Exemples d'accidents

Exemple 1 - Un élément de mobilier se trouve en contact pendant un temps très long, avec un radiateur. Les habitants de l'appartement sont partis en vacances et ont laissé le chauffage électrique en marche. Celui-ci chauffe un canapé et celui-ci pyrolyse. Les gaz s'accumulent, mais comme la source de chaleur n'est pas très importante, ils ne prennent pas feu et le local reste froid.
Les voisins détectent une odeur, et appellent les secours. Les sapeurs-pompiers sont donc appelés pour "odeur suspecte".
A leur arrivée, ils sont accueillis par les voisins, dans le couloir de l'immeuble. Ceux-ci leur indiquent qu'il y a une odeur, et leur montrent l'appartement d'où elle provient. Les sapeurs-pompiers ne détectent aucun signe de chaleur et entrent.
Ils se tiennent debout, n'ont pas de moyens hydrauliques et ne branchent pas leurs appareils respiratoires puisqu'il n'y a ni chaleur, ni fumée dense. Seule cette odeur et éventuellement une légère fumée flottent dans l'appartement. Pour ventiler, les sapeurs-pompiers ouvrent la fenêtre et cherchent un peu partout la source de l'odeur. Ils découvrent un mince filet de fumée qui sort de derrière un canapé. Ils déplacent alors les coussins et le canapé.
Sans le savoir, ils sont face à une zone extrêmement combustible, chargée en gaz de pyrolyse. Ces gaz ne sont pas assez mélangés au comburant pour prendre feu. Le déplacement du canapé va créer une turbulence et provoquer ce mélange. En une fraction de seconde les gaz prennent feu et le canapé s'embrasse. La pièce devient un véritable enfer. Cette intervention s'est déroulée en janvier 2006 au Canada et a causé la mort d'un des sapeurs-pompiers.

Exemple 2 - Les sapeurs-pompiers sont appelés pour feu dans une chambre d'hôtel. Cet hôtel est situé sur un secteur rural. L'intervention se déroule assez rapidement: le binôme d'attaque monte par l'escalier et attaque violement le feu à fort débit. En quelques secondes celui-ci est éteint. Légèrement brûlés à la nuque par les retombées d'eau, les deux hommes redescendent quelques instants, puis remontent déblayer, en gardant leur tenue de feu complète et leur appareil respiratoire. En entrant à nouveau dans la chambre, ils constatent une présence de fumée blanche et pensent que cette fumée est en fait la vapeur d'eau de l'extinction. Ils commencent à déblayer et à un certain moment, déplacent le matelas qui avait pris feu. Sous le matelas, des éléments incandescents sont toujours présents et la fumée blanche y est concentrée: le mouvement du matelas ventile ces fumées qui prennent feu. Les gaz étant accumulés au plafond, ceux-ci prennent également feu et les deux hommes ont alors l'impression qu'un plafond de feu leur tombe dessus pendant quelques secondes. Ayant eu le réflexe de s'allonger il ne seront pas blessés. Cette intervention s'est déroulée il y a quelques années dans le Sud-Ouest de la France.

Les exemples sont nombreux et nous pouvons les classer globalement en trois catégories:

  • Les accidents lors de l'inflammation initiale. C'est le cas de l'accident du Canada . Forte pyrolyse, mais pas de flammes. Si l'énergie présente est forte, l'inflammation sera rapide. Dans le cas contraire, l'accumulation des gaz peut-être très importante et déboucher sur une inflammation explosive. Dans ce cas nous parlerons de "smoke-explosion" c'est à dire d'une explosion de fumée, dont on voit bien que le déclenchement n'a rien à voir avec celui d'un backdraft.
  • Les accidents lors du déblai. Dans ce cas, les fumées blanches sont aisément confondues avec la vapeur. Les placards, les faux plafonds, les greniers sont autant de pièges et comme les déblais sont l'occasion de déplacer parfois violement des débris encore chauds, il y a risques d'inflammation.
  • Les accidents dans des locaux adjacents. Le feu prend dans un local et chauffe par exemple le local du dessus. La moquette se met à pyrolyser. Lorsque le local inférieur est éteint, le local supérieur conserve la fumée blanche. Celui-ci est donc un volume dans lequel se trouve à la fois le combustible et le comburant. Il suffit que ce volume soit mis en contact avec une source d'ignition pour que l'explosion se produise. La même chose peut se produire par déplacement de fumées via des gaines de ventilation, par des fissures dans un mur etc.

Dans tous les cas, des règles s'imposent:

  • Tenue de feu complète avec appareil respiratoire isolant en marche
  • Moyen hydrauliques puissants
  • Evacuation du niveau et des étages supérieurs (au minimum)
  • Engagement du minimum de personnel
  • Regroupement des moyens sous le niveau concerné ou assez loin
  • Ne jamais déplacer brusquement les objets au risque de créer des turbulences et favoriser ainsi l'inflammation des gaz accumulés
  • N'ouvrir les fenêtres que lorsque l'on sait exactement ce qui se passe.

Et en tout état de cause, toujours rester extrêmement vigilant !

Article Par PL Lamballais / pl.lamballais@flashover.fr

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