Nous avons déjà débattu ici du besoin
de disposer d'un gros débit pour éviter les accidents
sur les feux intérieurs. Le fait que certaines sociétés
privées donnent des cours aux sapeurs-pompiers en caisson
« flashover », en utilisant des lances ne pouvant
produire que de petits débits, à engendré
une certaine confusion, accentuée par le fait que ces
sociétés se revendiquaient des travaux de Paul Grimwood.
Accordant une très grande importance à la sécurité
du personnel engagé, Paul a rédigé un article,
disponible en première page de son site firetactics.com.
Il nous a demandé de le traduire et de la placer ici. Cet
article devrait permettre à tous de constater la concordance
de point de vu avec nos propos: si un petit débit peut
suffire dans la plupart des cas, seul un gros débit disponible
instantanément et ce dès la première ligne
d'attaque, sera à même d'assurer la sécurité
du personnel engagé.
Le besoin en débit sur les lances pour l'attaque intérieure
Par Paul Grimwood (Eurofirefighter - Firetactics.com - Mai
2008)
La définition de ce qu'est un débit minimum sécurisant
pour la lutte incendie, a fait l'objet de débats dans
plusieurs pays, durant la dernière décennie. Le
concept d'entraînement basé sur le principe du CFBT
(Compartment Fire Behaviour Training = Entraînement aux
situations de feux de compartiment), dans lequel les sapeurs-pompiers
utilisent des FDS (Fire Dynamic Simulator - Caissons maritime
« flashover ») apparaît comme ayant créé
des illusions dans ce respect d'un débit sécurisant.
Lorsque les sapeurs-pompiers réalisent leurs entraînements
dans des containers de démonstration à 1.5MW (Ndt
: container avec foyer surélevé) ou dans des
containers d'attaque à 2.3 MW (Ndt : container
avec foyer au sol), ils ne font l'expérience que d'un
feu « léger », principalement en phase gazeuse,
avec seulement une très faible phase « solide »
.
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Container d'attaque. La zone de feu est au niveau du sol. Puissance généralement constatée
: 2.3 MW |
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Container d'observation. La zone de feu est surélevée.
Puissance généralement constatée: 1.5 MW. |
Ces feux d'entraînement ne représentent qu'environ
50% d'un feu de local pleinement développé, en terme
de puissance thermique, et sans doute encore moins au niveau de
la charge en combustible solide. En fait, un appartement de 5
pièces peut passer du flashover dans une seul pièce,
à un feu impliquant totalement les 5 pièces en moins
de 30 secondes, lorsque les portes intérieures sont ouvertes.
Avec un tel potentiel d'accélération de la propagation,
il est essentiel que vous fournissiez à vos sapeurs-pompiers
une quantité d'eau qui sera assez «sécurisante»
et disponible dés la première lance mise en oeuvre.
C'est ici que nous trouvons quelques conflits entre les entraînements
en caisson «flashover» et les «vrais feux».
Dans le confinement des containers «flashover», l'expérience
nous a montré que nous pouvions en toute sécurité
supprimer les gaz combustibles enflammés dans les couches
supérieures, et contrôler le développement
du feu avec des débits aussi faibles que 40 litres par
minute (container d'observation) et 100 litres par minute (container
d'attaque).
Mais l'expérience nous a également montré
que lorsque les «vrais feu» montent rapidement en
puissance et enflamment les gaz combustibles dans les compartiments
adjacents, lorsqu'une ventilation soudaine survient suite à
la rupture d'une fenêtre, ou lorsqu'un vent extérieur
change les conditions en produisant parfois des effets de «blow
torching» (torche de feu), le sapeur-pompier doit avoir
à disposition immédiate un débit de lance
qui lui permettra de contrer de telles conditions pour se sauver
ou se mettre temporairement à l'abri dans une zone plus
sûre.
En France et aux USA, des débits minimums ont été
définis comme étant assez «sécurisants»
pour laisser les sapeurs-pompiers pénétrer dans
les structures. Ces débits sont de 500lpm pour la France
et de 378lpm pour les USA (Ndt: plusieurs experts militent
pour que ce débit passe officiellement de 378lpm à
500lpm).
Il y a de très bonnes raisons à cela, entre autres
le fait que ces débits ont été calculés
pour lutter contre les charges combustibles actuelles et la puissance
thermique résultante. En fait, aux USA il est très
fréquent de voir des débits de l'ordre de 550lpm
disponibles en première attaque.
Au Royaume-Uni, j'ai milité sur une période de
10 ans, afin d'obtenir un débit minimum «légal»
(débit basé sur de nombreuses recherches empiriques
et sur des calculs scientifiques). Ceci a été conforté
par la mort tragique de 8 sapeurs-pompiers en 3 accidents, depuis
2004, accidents sur lesquels il a été constaté
que l'attaque initiale avait été réalisée
avec des moyens dont le débit était insuffisant.
Bien qu'il apparaisse qu'une toute petite quantité d'eau
soit suffisante pour refroidir efficacement la couche de gaz combustible
dans un compartiment simple (une seule pièce), lorsque
les gouttes d'eau sont d'un diamètre adéquat et
que les paramètres de ventilation sont strictement maîtrisés,
nous semblons avoir oublié le besoin d'un débit
plus grand, qui doit être immédiatement disponible
lorsque le feu prend rapidement de l'ampleur, impliquant alors
plus de combustible et se propageant dans les autres locaux.
Je n'apporte pas mon soutien à l'utilisation de lances
qui ne pourraient pas offrir un débit minimum d'au
moins 380lpm pour le combat d'un feu en intérieur. Tout
aussi important, ce débit minimum doit être réellement
disponible à la lance, ceci dépendant des pertes
de charge et de la capacité des pompes. Au Royaume-Uni,
il a en effet été établit que des lances
réglées à 450lpm ne fournissaient parfois
que 280lpm, à cause de mauvais réglages de pompes.
Dans le passé, il a été démontré
que des débits aussi bas que 200lpm pouvaient être
suffisants pour traiter des feux en local «simple»
(une seule pièce), totalement impliqué et ayant
passé le stade du flashover. Cependant, l'accumulation
des gaz dans les passages et les locaux adjacents, laisse supposer
que le feu peut soudainement faire irruption dans d'autres zone
et se développer plus vite que ce qu'un débit de
200lpm pourra contrôler. Un feu de 3MW peut ainsi devenir
un feu de 15MW en moins de 30 secondes ! Dans ce cas, un débit
plus important doit être instantanément disponible.
Il est essentiel que les sapeurs-pompiers s'entraînent
avec les lances qu'ils utiliseront sur les «vrais feux»,
même si ces lances ne sont pas parfaitement adaptées
aux environnements d'entraînement (caisson flashover). Si
la lance a un réglage de débit qui permet d'envoyer
dans les couches gazeuses, de toutes petites quantités
d'eau, mais aussi de passer immédiatement à un débit
supérieur à 380lpm si le besoin s'en fait sentir,
alors cette lance devra être utilisée pour tous les
scénarios d'exercices et aussi sur les «vrais feux».
En agissant autrement, vous faites courir un grand risque
à vos sapeurs-pompiers.
Paul Grimwood - Mai 2008