JOG: l'efficacité pour forcer les portes

Date: 21 décembre 2006 à 10:47:16
Sujet: Matériel


Dans les interventions pour personnes ne répondant pas aux appels ou dans le cadre de feux de locaux, le forcément de la porte est une étape essentielle. Outre le fait que le forcément doit, le cas échéant, permettre de refermer la porte après le passage des secours, l'ouverture de l'ouvrant doit se faire avec le plus de précaution possible. Dans le cas d'un local en mode pré-backdraft, l'ouverture brutale de la porte avec une masse ou un bélier, placera les intervenants dans le cône d'expansion de l'explosion, donc à l'endroit le plus dangereux.
Il est toujours possible de dire qu'il faut " tester la porte ", mais les analyses récentes démontrent de façon évidente que la froideur d'une porte n'exclue pas la présence d'une ambiance thermique dangereuse. D'abord parce que les portes d'appartement sont réglementairement coupe-feu 30 minutes et ensuite parce que les produits de pyrolyse lente peuvent avoir des températures d'auto-inflammation inférieures à 300 voir 250 °C.
Dans le cas d'un local déjà ventilé, l'ouverture violente et totale de la porte risque d'apporter au feu le surplus de comburant qui lui permettra d'atteindre la puissance thermique nécessaire au déclenchement du flashover. Il existe pourtant quelques solutions, entre autre le JOG, développé par un sapeur-pompier de Paris.

La qualité des portes actuelles et en particulier les blindages, accentuent encore la difficulté de forcement. Face à une porte qui résiste, l'effort nécessaire va inciter les intervenants à se focaliser sur l'ouverture au détriment de leur sécurité. C'est ce qui s'est produit, il y a quelque temps en France, sur le département du Rhône.

Appelés pour un feu d'appartement, les sapeurs-pompiers se sont trouvés face à une porte blindée, équipée d'un mécanisme de fermeture à l'Italienne (photo ci-contre). Ce type de mécanisme utilise des goujons d'acier d'environ 20mm de diamètre, qui rentrent dans l'huisserie de la porte. La particularité étant que ces goujons sont souvent présents sur les deux côtés de la porte (côté ouverture et côté gonds) mais également en haut et en bas, pour empêcher l'arrachement avec des moyens conventionnels (pied-de-biche par exemple). Armés d'un bélier, les sapeurs-pompiers ont donc tenté de défoncer la porte. Au bout de plusieurs minutes, l'attention s'est relâchée ce qui, compte tenu de l'effort nécessaire, est tout à fait compréhensible.

Après plus de 30 minutes d'effort, la porte a cédé d'un coup ! L'incendie avait eu le temps de progresser et de se communiquer aux deux étages supérieurs et à l'ouverture, le sapeur-pompier utilisant le bélier a été brûlé.

Outils d'ouvertures
Les outils permettant de défoncer les portes sont donc à exclure : hache, masse ou bélier, nécessitent des efforts importants, ce serait-ce que par leur poids. Avec ces outils, l'ouverture de la porte se fera toujours de façon brutale avec une forte détérioration de l'ouvrant. Même s'il détecte la survenue imminente d'un problème, le sapeur-pompier, pris par l'élan du dernier coup de masse, aura peu de chance de pouvoir refermer la porte.
La petite pince, ou la grande pince sorte de pied-de-biche rudimentaire, sont des outils plus souples d'utilisation, mais qui deviennent vite inutiles face à une porte blindée.

L'outil PRO-BAR (également appelé Halligan bar) est un outil de forcément, utilisé depuis une trentaine d'année par les sapeurs-pompiers Américains. Conçu par Hugh Halligan, "First Deputy Fire Commissioner" au service incendie de New-York, cet outil est une sorte de mélange entre un pic, une lame et un levier. Il peut servir à ouvrir des portes, faire sauter des cadenas, défoncer des cloisons, couper de la tôle etc Ses qualités surpassent largement la masse ou la grande pince, mais il sera toujours difficile de lutter contre une porte blindée surtout si celle-ci est équipé d'un mécanisme à l'Italienne.

Le JOG : la réponse ultime
La 5éme Compagnie Incendie de la BSPP (Brigade des Sapeurs-Pompiers de Paris) est composé d'hommes sensibilisés aux problèmes des portes d'appartement et aux phénomènes thermiques, entre autres parce que cette compagnie a été endeuillée par l'accident de Neuilly, le 14 septembre 2002, durant lequel 5 sapeurs-pompiers se sont trouvés piégés et sont morts dans un backdraft haute pression.
Le Major Bernard JACQUINOT appartient à cette compagnie et il est l'inventeur (entre autres !) d'un outil particulièrement puissant : le JOG. Alors qu'il a fallu 30 minutes aux sapeurs-pompiers Lyonnais pour ouvrir la porte à coup de bélier, le Major Jacquinot a réalisé la même opération, sur une porte strictement identique en... 3 minutes ! Sur une porte "ordinaire" l'ouverture se déroule en moins d'une minute.
Le JOG est un outil de forcement pneumatique qui se compose d'un piston d'environ 15 cm de diamètre et de 55 cm de long (au repos), terminé à ses deux extrémités par des pattes taillées en biseau. L'ensemble, en titane, pèse environ 14 kilogrammes et peut donc être manipulé par un homme seul.

L'utilisation
A genou devant la porte, le sapeur-pompier soulève l'appareil, et place les pattes en biseau de la partie fixe du JOG sur le côté de la porte. Il tire ensuite sur la poignée pour étendre le piston, dont les pattes (également en biseau), atteignent l'autre côté de la porte. Un appui sur un bouton met le JOG en pression : l'appareil tient alors tout seul ! Le système de manoeuvre à distance permet de s'éloigner d'environ 5 m pour se placer hors du cône d'expansion d'une éventuelle explosion.

Le JOG en place

Il reste à appuyer sur le bouton du boîtier de commande : le JOG exerce alors une pression de 1,5 tonnes pour écarter l'huisserie, et en même temps un autre piston exerce une pression de 4,5 tonnes en poussée sur la porte pour ouvrir celle-ci.
Dans le cas d'une porte avec un blindage très résistant et un système anti-arrachement, l'ouverture se fait en plusieurs étapes: une fois au milieu, une fois en haut, une fois en bas, puis retour au milieu.

Conçu par un sapeur-pompier, le JOG répond à la totalité des attentes :

  • La petite bouteille qui l'équipe, se gonfle à l'air, avec un simple gonfleur ARI (300 bars) et autorise près de 10 ouvertures
  • La rallonge de commande permet, avec ses 5 m, de se placer dans une zone protégée
  • Un système de rallonge permet d'augmenter la largeur du système pour l'utiliser sur des portes double-battants
  • Le bouton de mise en pression et le bouton de purge, qui sont tous deux sur le boîtier de commande, ne sont pas de la même hauteur ! Dans le noir et la fumée, avec des gants de feu, ces boutons restent donc faciles à distinguer.

En mettant une simple petite sangle entre le JOG et la poignée, on évitera que la porte ne s'ouvre d'un coup. Il sera donc possible d'utiliser le JOG simplement pour forcer une porte fermée, et ensuite d'utiliser un protocole de pénétration classique, tel que cleui décrit dans notre document Jet-Débit-Action.

La commande à distance est également utilisée dans le cas du forcément de fenêtre, à partir d'une échelle aérienne, le JOG étant alors complété par un système de sangle destiné à le retenir si l'ouvrant cède trop brutalement.
Pour éviter les problèmes d'ouverture trop brusque, il est également possible de mettre une sangle sur la poignée de la porte, afin que celle-ci soit retenue.


Le JOG peut être placé en oblique, ce qui le rend utilisable sur des portes très étroites. Pour les portes très larges il suffit d'utiliser la rallonge fournie avec l'appareil, et de faire coulisser le piston "poussant", pour le placer au mieux sur le point à forcer. Il est donc possible de forcer des portes de seulement 60 cm de large, mais d'aller jusqu'à des ouvrants de 1,30 m (porte double ventaux par exemple).

Le JOG est commercialisé en France par la société FESTO, 8 clos Ste Catherine, 94360 BRY SUR MARNE. Quant à avoir une démonstration, il suffit de contacter le Major au 06.10.83.69.83 ou par mail bernardjacquinot@free.fr

Utilisé depuis plusieurs mois par la 5éme Compagnie, le JOG est également utilisé avec succès par la Brigade des Stupéfiants (France).

Pierre-Louis Lamballais





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