Les lances POK ont la réputation d'être des lances
simples, robustes mais assez peu précises. Dans le cadre
de la gestion des feux de locaux, elles donnent pourtant un résultat
quasi-parfait. Nous allons donc faire le tour de deux modèles
de lance POK, très semblables, la Debikador 500 et la Turbokador
500.
Les lances POK de cette série sont disponibles en 3
types de débit: les lances avec un débit maximum
de 150lpm, celles avec un débit maximum de 500lpm et les
lances avec un débit maximum de 1000lpm. Nous ne nous intéresserons
qu'aux lances de type "500lpm" puisque ce sont les seuls
lances utilisable "à la main" dans le traitement
des feux de locaux, tout en assurant la sécurité
des intervenants.
Réglage de débit
Sur ces lances, le débit se règle avec une bague
rotative. Le principe est habituel : la rotation de la bague vers
la gauche donne un gros débit. Sur ces modèles,
il y a 3 débits: 150, 300 et 500lpm. En continuant à
tourner la bague au-delà de la position 500lpm, nous passons
en jet purge.
La bague est d'un diamètre légèrement supérieur à celui du corps de la lance. Cette bague est placée
devant le levier et fait environ 4cm de long, ce qui permet de
la saisir facilement lorsqu'on a des gants de feu, même
si ceux-ci sont épais (ce qui montre d'ailleurs qu'essayer
une lance sans gants n'est pas une bonne idée!). Sachant
que les changements de débit se font généralement
avec la lance fermée, nous constatons que les graduations
de débit restent visibles, même avec le levier rabattu,
ceci venant du fait que le levier ne comporte pas de barre intermédiaire.
Un bon point!
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Influence du débit
Le changement de débit influe sur le recul de la lance
et sur la taille de gouttes. Concernant le recul, celui-ci est
très faible en petit débit, mais assez fort en gros
débit. Ceci étant, le porte lance devant être
bien calé (debout ou à genou), ce recul ne pose
pas de problème. Un entraînement est néanmoins
nécessaire surtout afin de ne pas se faire surprendre à
l'ouverture, le risque étant alors que le porte lance n'ouvre
que partiellement le levier, détériorant ainsi le
jet.
Comme sur toutes les lances à réglage de débit
à la bague, la rotation de celle-ci entraîne le déplacement
du clapet situé à l'extrémité de la
lance. En petit débit, le clapet ne laisse passer qu'un
petit anneau d'eau. En tapant sur les dents, celui-ci produit
donc de petites gouttes. En gros débit, le clapet est éloigné,
et laisse donc passer un anneau d'eau plus épais. En tapant
sur les dents, cet anneau d'eau produit donc de grosses gouttes.
Cette particularité est très intéressante
: le refroidissement des fumées demande une toute petite
quantité d'eau, donc un petit débit, et des gouttes
qui devront rester suspendues en l'air, le plus longtemps possible.
Or, comme ici le petit débit donne des petites gouttes,
ce double objectif est atteint. Dans le cas d'une attaque combinée (ZOT), il faut un
gros débit et des grosses gouttes pour obtenir un pouvoir
de pénétration au travers du rayonnement qui entoure
le combustible solide. La encore, ce double objectif est atteint.
Nous notons cependant que la position de l'anneau d'eau ne change
pas contrairement à certains modèles de lances Akron.
En petit débit, l'anneau d'eau tape sur le bas des dents,
et au fur et à mesure de l'augmentation de débit,
l'eau d'eau "monte" le long des dents. Sur certains
modèles de lances Akron, la position de l'anneau d'eau
varie et celui-ci tape toujours au centre des dents. La différence
de qualité des jets est néanmoins très faible.
Le boisseau
Ces lances possèdent un boisseau sphérique. Lorsque
le levier est basculé vers l'avant, le boisseau est fermé.
Lorsque le levier est basculé vers l'arrière (donc
vers le porte lance), le boisseau est ouvert. Classique! Nous
notons qu'une ouverture partielle du levier entraîne une
perturbation de la colonne d'eau qui traverse la lance et donc
une détérioration de la qualité du jet. Si
nous voulons conserver une qualité optimale du jet, par
exemple pendant les impulsions, l'attaque combinée etc...
il faut donc ouvrir la lance d'un coup, en totalité. C'est
d'ailleurs pour cela qu'il faut tenir la lance fermement en tendant
le bras qui tient la poignée. Si la lance est tenue trop
prés du corps, l'ouverture du levier risque d'être
partielle car on ne sera pas assez à l'aise pour le basculer
en totalité.
D'un point de vue formation, le fait de devoir ouvrir le levier
d'un coup et totalement, dans le cas des impulsions, ne pose aucun
problème. En tout cas ce geste « complet »
et nettement plus facile à réaliser que le geste
"partiel" nécessaire sur les lances à
boisseau coulissant.
A noter également que cette détérioration
du jet par basculement partiel du levier, peut s'avérer
très utile: pour noyer des braises, pour badigeonner un
meuble qui pyrolyse, ou pour réaliser une attaque alternant
pulsing-penciling, il suffit de se mettre en jet droit et d'ouvrir
partiellement le boisseau: la lance produira alors une sorte de
versement d'eau, comme si elle était en mode purge, mais
avec un débit qui pourra rester très faible.
La tête de diffusion
Son réglage est conforme à la règle générale
: je tourne à droit et j'ai un jet droit. La tête
de diffusion est assez grosse, mais se tient très bien
en main.
Elle est montée sur une rampe hélicoïdale irrégulière,
ce qui facilite grandement les réglages.
Rampe hélicoïdale
C'est la position relative de l'anneau d'eau et de l'angle de
la tête qui détermine la forme du jet. Pour produire
un jet droit la tête de diffusion doit être avancée
au maximum et pour un jet de protection, elle doit être
reculée au maximum. Le problème concerne les réglages
intermédiaires (jet d'attaque). En effet, la translation
nécessaire pour passer de jet droit à jet d'attaque
n'est pas la même que pour passer de jet d'attaque à
jet de protection. Exagérons pour mieux comprendre: imaginons
que pour aller de jet droit à jet de protection (donc
les deux extrêmes) il faille faire coulisser la tête
de 10 cm. Le problème c'est que pour la faire passer en
jet d'attaque il faut la faire coulisser de seulement 2 cm quand
on est en jet de protection et de 8cm quand on est en jet droit.
En fait, le jet dont l'angle est entre (au milieu) droit et protection,
nécessite une position de tête qui elle n'est pas
entre (au milieu) les deux extrêmes.
Or, nous savons que la tête de diffusion d'une lance ne
se coulisse pas directement, mais se tourne: quand on la tourne,
elle suit un filetage et elle avance, comme un écrou
que l'on tourne sur une tige filetée qui est fixe. Sur
certaines lances, le filetage est régulier: il faut donc
tourner "un peu" pour passer d'un jet de protection
au jet d'attaque et tourner "beaucoup" pour passer
du jet droit au jet d'attaque. Et ce n'est pas pratique du tout!
Sur les lances POK, Akron etc... la rampe hélicoïdale
a un filetage irrégulier. Le même angle de rotation
de la tête permet donc de passer d'un jet droit à
un jet d'attaque ou d'un jet de protection au jet d'attaque.
Cette particularité se vérifie en tenant la lance
de profil et que en tournant doucement la tête de la lance,
ce qui permet de voir que pour le même angle de rotation,
l'ampleur de son déplacement n'est pas le même en
début et en fin de course. Ergonomiquement c'est un "+"
indéniable, et il faut éviter le plus possible
les lances ne possédant pas cette particularité. |
Sur les premiers modèles de ces lances, la position
"jet d'attaque" était notée par un petit
dessin, mais il n'y avait pas de cran. Sur les modèles
plus récents, il y a un cran qui marque bien cette position.
Mais le dessin a été remplacé par le terme
"flashover" ce qui est assez inutile. Revenir à
un simple dessin avec le cran serait sans doutes préférable
!
Il faut noter que ce cran, comme sur pratiquement toutes les
lances, indique un jet d'attaque dont l'angle est correct, mais
exclusivement en gros débit. C'est une position qui convient
pour l'attaque combinée (voir l'article à ce sujet)
mais pas pour les impulsions dans la phase gazeuse du feu.
Ce point est important à noter : en progression, ou lors
de l'attaque "pulsing-penciling", le porte-lance utilise
un petit débit. Or, comme sur la quasi totalité
des lances, le débit influe sur l'angle du cône.
S'il règle sa lance en petit débit avec la tête
de diffusion sur le cran « attaque », le porte lance
obtiendra un jet trop étroit, qui ira trop loin, percutera
les parois et ne donnera pas un bon refroidissement des gaz. Pour
avoir un jet de progression ou un jet de pulsing pour l'attaque
des gaz, il faut mettre la tête dans une position intermédiaire
entre le jet de protection et le jet d'attaque. Sans regarder
sa lance, le porte lance peut obtenir facilement ce réglage
en tournant la tête tout à gauche puis en la ramenant
d'environ 1 cm vers la droite. Il obtiendra alors un jet avec
un angle d'environ 60°, idéal pour les impulsions et
envoyant de fines gouttes, juste devant lui (voir l'article sur
la progression et celle sur l'attaque pulsing-penciling).
Denture fixe ou turbine
Les lances de cette série sont disponibles en deux modèles,
nommés Turbokador et Debikador. Sur les Turbokador, la
denture est rotative (turbine). Elle est entraînée
par l'eau sous pression, lorsque la lance est en jet diffusé.
Celle-ci "découpe" l'eau de façon plus
fine, évite la projection d'eau avec l'effet de "doigts"
et assure la production d'un cône qui assure une meilleure
protection. En jet droit, l'eau passe au centre et n'entraîne
pas la turbine.
En contre partie, cette turbine et assez fragile. Il convient
d'en prévoir une ou deux de rechange car une fois qu'il
y a quelques dents de cassées, la rotation n'est plus possible
et le pulvérisé est alors dégradé.
Pour remplacer la turbine, il suffit de retirer les vis que l'on
voit sur la tête de la lance.
Le modèle Débikador possède une tête
à denture fixe. La version avec des dents métalliques
produit un pulvérisé de très bonne qualité.
Allié à une très bonne solidité, ce
modèle est sans doute le meilleur des deux, d'autant que
son prix est particulièrement bas!
A noter que sur ces lances (comme sur la plupart des lances de
ce type), la pression de fonctionnement, à la lance, est
de 6 bars. En dessous de cette pression, la qualité du
pulvérisé est fortement dégradée.
La forme du jet
Le jet diffusé produit par ces lances est un jet creux.
Certains fabricants ont tenté de produire des lances produisant
des jets "pleins", ce qui devrait théoriquement
produire un meilleur refroidissement. Ce n'est qu'en analysant
le jet de profil que nous constatons que cette information est
erronée.
En effet, si le jet est balayé, ce qui est le cas avec
l'attaque combinée (ZOT), le fait qu'il soit creux n'a
pas tellement d'importance. Ce "creux" n'est donc problématique
que lorsque l'on ne déplace pas la lance, par exemple lors
des impulsions pour la progression.
Or, une impulsion donne un jet conique, dont la portée
est très faible. En fin de course, les gouttes retombent,
en formant une parabole. Mais toutes les gouttes ne sont pas projetées
avec le même angle, suivant qu'elles se trouvent sur le
haut, le bas ou les côtés du cône. Le résultat c'est qu'en fin de course, la chute de
l'ensemble des gouttes produit une sorte de sphère, pleine
de gouttes. Et c'est cette sphère qui refroidit les gaz,
pas le cône. Par contre, la consistance du cône va
avoir un impact sur la qualité de ce nuage de goutte:
plus le cône sera creux et bien formé, plus ces
parois seront composées d'un grand nombre de gouttes et
plus la sphère sera bien formée.
Paradoxalement,
c'est donc un cône très creux qui produira certainement
le meilleur refroidissement de la phase gazeuse d'un feu puisqu'il
produira une sphère bien remplie.
Avec les lances POK et plus particulièrement le modèle
Debikador, le nuage est très bien formé. En petit
débit, ce nuage, composé de minuscules gouttelettes,
reste suspendu en l'air plus de 6 secondes, ce qui permet un
refroidissement très important de la zone gazeuse. En
plus, la vitesse de projection de l'eau alliée au faible
poids des gouttes, produit un déplacement horizontal de
cette sphère d'eau, qui avance donc devant le porte lance,
en le protégeant, sans toucher les parois.
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Les "gadgets" POK
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Lors de l'achat de ces lances, ou par la suite, il est possible
de racheter des poignées, des leviers. Ces éléments
sont disponibles en plusieurs couleurs ce qui peut permettre
de distinguer les lances. Ainsi un engin incendie peut avoir
les lances avec des poignées bleues, un autre avec les
poignées rouges etc.
Parmi les éléments que l'on peut changer il
y a aussi l'entourage des têtes de diffusion. Nous avons
remarqué qu'il en existait de deux sortes: soit des têtes
assez caoutchoutées, soit des têtes en une matière
plus lisse, un peu brillante, avec une sorte de gros ergo, censé
sans doute permettre le repérage de la position. A l'usage
ces têtes s'avèrnte un peu moins pratique que les
tête "simple", et caoutchoutée, l'ergo
étant de toutes façons inutile en intervention
puisque le porte lance doit être capable de régler
sa lance sans la regarder et que le système de rampe hélicoïdale
irrégulière facilite grandement ce choix de réglage.
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Conclusion
Les lances POK de cette série sont robustes, simples à
manipuler et donnent des résultats très intéressants
au niveau de la qualité des jets. Ergonomiquement, ces
lances sont excellentes, avec une bonne préhension et un
bon équilibre. Le réglage de débit est facile
à réaliser. Seule la notation "flashover"
sur la tête est discutable et mériterait d'être
remplacée par un simple dessin de jet d'attaque, ce qui
était le cas sur les premières versions de cette
lance. Bien sûr, ce cran donne un jet trop étroit
pour la progression, mais c'est le cas avec toutes les lances
puisqu'un jet correct pour l'attaque en terme d'ouverture ne
convient pas pour la progression.
En résumé, nous sommes là avec de très
bonnes lances, robustes, efficaces et en plus, peu coûteuses!
http://www.pok.fr/
Merci à l'Ecole du Feu de Jurbise (qui utilise ses lances
pour ses formations!) pour les photos.